Un petit cœur rouge

Fabrice m’avait prévenu il y a un mois, il finissait sa carrière fin juin. Le pot pour son départ à la retraite était organisé aujourd’hui à dix-sept heures. Cela faisait cinq ans, qu’on ne s’était pas vus. Il avait quitté le collège des Nations Unies à Combes-la-Ville pour La Rochelle, il espérait y retourner depuis plusieurs années. Une fois par an, on s’appelait, il m’avait aidé, moi j’étais un jeune enseignant arrivant dans une banlieue difficile, lui il avait déjà vingt ans d’expérience. On a toujours gardé ce rapport, il est celui qui sait, moi celui qui l’écoute. Je sais très peu de choses sur sa vie personnelle, le peu que j’ai réussi à savoir, je lui ai arraché, ou je l’ai deviné. Je crois qu’il est toujours célibataire. Je lui posais peu de questions, je voyais bien que cela le mettait mal à l’aise. Je sais qu’il écrit des romans, j’ai eu l’occasion de lire un de ses manuscrits. Un récit étrange, l’histoire d’un jeune homme, qui partait à la recherche d’un écrivain, celui-ci portait le même nom que son père disparu. Et ce héros en quête d’un père emmène avec lui, sa compagne en Italie. J’avais trouvé très étrange le personnage de la jeune femme, elle était irréelle, elle le suivait sans réaction, ballottée par l’enquête, comme une poupée. Il avait une écriture énergique et vive, l’inverse de l’impression qu’il donne quand on le rencontre. Il a cette voix douce et lente, on imagine qu’il ne s’énerve jamais, que tout est pensé, sous contrôle. Je crois qu’il ne comprend pas la bêtise, ce repos confortable. Mais son intelligence est un peu perdue, comme si le monde restait pour lui un mystère insondable. Je le reconnais devant les portes de la gare. Il fait une chaleur étouffante, fin juin, c’est le début d’un été chaud. J’aime les gares, surtout les gares de province. Elles sont déjà un voyage, tout est exotique, nouveau. Je descends du wagon et je vais vers lui. Il est devant moi, toujours vêtu d’une chemise à manches longues et d’un jean, une paire de chaussures bateau, marron, rien n’a changé, le même uniforme. Il a toujours ce visage doux, habillé d’un regard un peu myope et d’un sourire amical. Ses cheveux ont blanchi, je retrouve dans l’instant l’homme que j’avais connu, presque un ami, mais la barrière qu’il élève autour de lui et qui le protège de toute familiarité est toujours là. Il m’accompagne à mon hôtel, pendant le trajet j’apprends qu’il est toujours célibataire, il vit dans un petit deux-pièces au centre-ville. Je lui parle de Julie, de notre envie d’avoir un enfant, il sourit, il a ce sourire qu’ont quelquefois les exilés quand on parle de leur pays, ce pays qu’il n’arrive pas oublier, celui qu’ils ont vu il y a longtemps. Il propose de venir me chercher vers seize heures trente, son pot de départ est prévu au collège une demi-heure plus tard. Je monte dans ma chambre. J’ai deux heures devant moi. J’ai un appétit de loup, je pose mon sac et je vais dans la rue Saint-Nicolas, une rue où il y a des bars pour les étudiants. En milieu d’après-midi, il n’y a que quelques petits groupes buvant de la bière. Je continue mon chemin, au coin d’une rue où il y a un snack, le comptoir de Walter, je m’installe à une table. Je mange vite et bien et je vais marcher. Je m’écarte du quartier étudiant. Les rues sont désertes, le soleil découpe des tranches de lumière dans l’ombre des immeubles. Je traîne, cela ne m’était pas arrivé depuis longtemps. Julie veut un enfant, moi aussi, tout le monde me prévient : tu verras avec un enfant, le temps va s’accélérer, tu n’auras plus une minute à toi. Mais j’ai envie d’être encore plus occupé, d’être débordé, j’ai toujours plus de choses à faire que je ne peux en faire et j’aime ça. J’avance, en profitant de chaque pas, souriant, une vie pleine m’attend. Une jeune femme, jolie, sort son vélo d’un porche, elle me regarde surprise de me voir, elle me sourit, elle monte sur son vélo, elle a un corps de danseuse, des attaches fines, elle part d’un coup de pédale facile. Je tourne à la rue suivante pour faire une boucle et revenir vers l’hôtel. J’avance la tête en l’air comme un touriste, s’étonnant d’un rien. Je sors mon téléphone, je photographie quelques portes cochères en bois, une façade en pierre, j’imagine un poème, des mots jetés sur une vidéo, une déambulation artistique, une vie possible que je ne réaliserai pas, ce n’est pas pour moi. J’arrive dans une zone ou de nouveaux immeubles se construisent près de la poste. J’entends des cris derrière une palissade en tôle, je regarde par un espace entre deux panneaux métalliques, et je vois deux jeunes gars habillés en survêtement noir qui donnent des coups de pied à un homme au sol. L’homme se protège comme il peut avec ses bras. Je les regarde faire, les deux jeunes demandent à celui qui est à terre : ils sont où ? Le plus petit, des deux, demande à l’autre d’aller chercher un morceau de fer à béton un peu plus loin sur un tas de gravats. Je ne sais pas pourquoi je crie : j’ai appelé les flics. Ils ne comprennent pas, je répète en criant : les flics arrivent. L’un d’eux me dit de dégager, qu’ils vont me massacrer. J’hésite à partir en courant, il faut qu’ils fassent le tour de la palissade pour venir sur moi, j’ai un peu de temps. On entend une sirène de police approcher. Ils donnent des coups de pied à l’homme au sol et ils partent en marchant d’un pas rapide vers les rues plus animées. Je fais le tour de palissade et je vais voir l’homme à terre. Il s’assoit, il est peut-être malgache, je lui demande comment il va, je l’aide à se relever. Je lui propose de l’emmener à l’hôpital, il refuse, il me dit que ça va. La sirène s’éloigne, elle part vers le centre-ville. L’homme me remercie, il va en boitant, jusqu’à une cabane de chantier collé à la palissade, il glisse une main entre les deux, il sort un sac plastique, il revient vers moi, il prend dans le sac un petit sachet qu’il me tend, il me dit : prends, éclate-toi, je refuse, il met de force un sachet dans ma main, et il me redit éclate-toi, donne ça a une fille tu seras son dieu, c’est de l’Ectasy spécial, c’est pour m’avoir aidé. Je regarde le sachet, il contient un comprimé rouge avec un cœur en creux gravé dessus. Je mets le sachet dans la petite poche de mon jean. Il part en boitant vers la gare. Je le regarde partir, j’hésite et je vais vers l’hôtel. Je prends une douche, je mets une chemise et une cravate, je remets mon jean. Je sors le cachet, je le remets dans ma poche, je pense en parler à Fabrice, je ne sais pas, peut-être lui donner, un cadeau de plus, qu’il s’amuse pour une fois et je me vois lui raconter mon aventure, être un peu un héros, le cachet en est la preuve. Je m’allonge sur le lit en l’attendant et je regarde un vieil épisode d’une série télé. Mon téléphone sonne, Fabrice est en bas, il m’attend. Je descends, il est garé juste devant l’entrée de l’hôtel. Il a mis un costume, il est élégant. Je me moque un peu de lui. Pendant le trajet, il me parle de son collège du nord de La Rochelle, à Mireuil. Il m’explique que ce n’est pas plus facile qu’aux Nations Unies, mais qu’ici aussi l’équipe d’enseignant est solidaire, après il m’interroge sur mon doctorat, je crois qu’il est fier de ma réussite. J’en profite pour le remercier une nouvelle fois. Il se gare sur le parking du collège, il reste une place libre, celle dédiée aux livraisons près du mur de l’accueil, il me dit que c’est plus prudent pour sa voiture. Je souris. Des tables sont installées dans le réfectoire. Une trentaine de personnes discutent en petit groupe. Fabrice me présente ses collègues, l’équipe est constituée essentiellement de jeunes enseignants. Fabrice me sert un verre de sangria, il me connaît, quand il y a plus de cinq personnes dans une pièce, il me faut un verre. La proviseure arrive, une femme d’une cinquantaine d’années, petite et énergique, elle est élégante. Elle vient nous saluer. Fabrice sourit. J’apprends que c’est une ancienne professeure d’histoire. Elle me demande sur quel sujet j’ai écrit ma thèse. Charlotte Corday, je réponds. Je détaille un peu le parcours de cette jeune femme courageuse qui a sacrifié sa vie pour ses idées. Elle me dit qu’elle aimerait lire ma thèse, je lui réponds que je lui en ferai passer un exemplaire par l’intermédiaire de Fabrice. Elle me remercie et elle nous quitte. J’observe Fabrice qui la regarde. Il ne voit qu’elle. Je souris maintenant, je découvre un autre Fabrice, derrière le moine, se cache un amoureux transi. Je pense au cachet, je peux peut-être donner un coup de pouce au destin. La proviseure prend un micro et elle fait un petit discours. Fabrice boit ses mots. Douze ans à enseigner à des gamins, une histoire qui lui semble lointaine et étrangère. Je ne sais pas comment il va remplir sa vie maintenant. Il a ça dans le sang. Les collègues de Fabrice ont préparé une petite chanson drôle. Je vois qu’il est touché. C’est le moment des cadeaux. Fabrice reçoit un vélo électrique avec ses accessoires, un casque et des sacoches. Un vélo de ville, ils ont oublié les pinces pour le pantalon. Fabrice remercie tout le monde, il est ému. Je crois que la proviseure aussi, elle le regarde avec tendresse. Avant de me lancer dans une opération « Tournez manège à l’ecstasy », j’essaie d’en savoir un peu plus. Je rejoins une jeune femme un peu ronde agrippée au buffet qui se bâfre de petits fours salés, je remplis mon verre avec une bonne louche de sangria. Elle fait partie de ces femmes qui joueront à la poupée toute leur vie. Je me présente, je lui demande si elle a des enfants, parce que moi, je vais en avoir un bientôt. Bien sûr elle est aux anges, elle en a deux, une fille et un garçon. Elle me prodigue des conseils, elle me félicite bien sûr, c’est la plus belle chose qui puisse m’arriver. Ça ne loupe pas, elle me montre ses deux petits monstres en photo. Je ne sais pas quoi dire, on dirait deux bouledogues que quelqu’un se serait amusé à vêtir de vêtements d’enfants et sur leur tête on se serait amusé à déposer une perruque noire Playmobil pour le garçon et une perruque brune à couette pour la fille. Je ne sais pas si pour elle cela a été la plus belle chose qui lui soit arrivée. Je la félicite quand même. Elle a sûrement créé une nouvelle espèce. Je lui demande si la proviseure à des enfants, ça suffit, elle est partie, je connais tout de la vie de cette femme, elle me raconte chaque détail à la vitesse des petits fours qu’elle aspire. J’apprends que la proviseure est veuve, saleté de cancer qui a tué son mari en six mois, elle a deux grands fils qui travaillent sur Paris. J’observe discrètement Fabrice qui discute avec elle, je les vois, je ne crois pas qu’ils se soient mis en couple, je perçois une distance, je vais interroger Fabrice pour en savoir plus. Je me sens bien, je souris bêtement, je ne bois jamais, alors quand je bois un peu, je suis tout de suite légèrement ivre et le monde est à moi. En marchant vers ce couple, je les imagine, Fabrice et cette femme, elle sur son bureau, la jupe relevée, un remake du facteur sonne toujours deux fois, mais j’arrête vite cette vision trop nette. Je crois qu’il y a un âge où il faut baisser la lumière. Ils arrêtent de discuter à mon approche, je crois qu’ils évoquent un ancien collègue, les derniers mots que Fabrice prononce sont : la vie est courte, il faut en profiter. Mais tu as raison mon Fabrice, profite, la vie est courte, je palpe avec mon pouce le sachet contenant le cachet dans mon jean. Je crois que l’opération » petit cœur rouge « va commencer. Je vais faire deux heureux, ce soir. Les verres sont vides, je me propose d’aller les remplir, ils sont tous les deux raisonnables, ils ont de la route à faire, ils prendront du cocktail sans alcool. Je vais au buffet, avec leurs verres. Je regarde autour de moi, tout le monde discute. Je pose les deux verres, je sors le cachet, je le pose sur la table et je pose ma main gauche dessus. Je prends la bouteille de cocktail de ma main droite et au début du versement, je me sers de ma main gauche pour tenir le verre et j’en profite pour lâcher le cachet dans le verre. Je retourne voir les amoureux avec mes deux calices. Je donne la potion magique à la déesse d’un soir. Fabrice parle de sa vie à venir, de son envie d’aller enseigner en Afrique. Je vois un peu d’admiration dans le regard de la proviseure, elle sourit. Je ne sais pas quel est le temps nécessaire pour que le cachet fasse effet. Les gens commencent à partir, je souffle un peu, il faut que je trouve un moyen pour qu’il reste tous les deux, je ne sais pas quelle voiture à cette femme, mais je connais celle de Fabrice, je m’éclipse pour aller aux toilettes, et j’en profite pour aller sur le parking. Je dégonfle les deux pneus de la voiture de Fabrice du côté qui longe le mur de l’accueil, et je retourne voir les tourtereaux. Fabrice évoque le Togo, le voyage qu’il a fait l’année dernière, la rencontre avec cette femme qui dirige un orphelinat. Je m’intéresse, je lui demande des précisions. Il est enthousiaste à l’idée de ce nouveau départ. Tout le monde est parti, nous ne sommes plus que trois. Fabrice nous remercie tous les deux, puis il ajoute qu’il est temps de fermer boutique. Nous allons au parking. Fabrice découvre ses deux pneus dégonflés, il ne s’énerve pas, il pense à une mauvaise blague de ses collègues. Fabrice reviendra demain avec un petit compresseur. La proviseure propose de nous déposer. Elle me dépose à l’hôtel, puis ils repartent vers l’appartement de Fabrice. Le lendemain j’ai attendu Fabrice, on devait se voir avant mon départ, j’ai cherché à le joindre, il ne répondait pas. J’ai pris mon train. J’ai essayé de nouveau de le joindre les jours suivants sans succès, j’ai imaginé qu’ils étaient partis tous les deux sur un coup de tête à Venise ou à Djerba. J’étais fier de moi, j’avais planté ma flèche, un cupidon moderne. Nous sommes parties avec Julie chez ses parents, ils habitent en Corse. Le vendredi j’ai reçu un appel sur mon portable. C’était le commissariat de La Rochelle, il voulait que je fasse une déposition au commissariat d’Ajaccio. Je me suis présenté le lendemain, samedi au matin. Un jeune homme m’a reçu, il ne devait pas avoir trente ans. Il se nommait Ange Bonelli. Je lui ai demandé pourquoi il voulait ma déposition. Il m’a répondu qu’une enquête pour viol était ouverte à La Rochelle, il n’en a pas dit plus, elle concernait Fabrice. Je lui ai fait le récit de mon séjour à La Rochelle, je n’ai pas parlé du cachet. Fabrice était soupçonné d’avoir violé une femme. Quand je suis rentré, Julie voulait tout savoir. Je lui ai fait un compte rendu de ma déposition. Bien sûr elle m’a posé cinquante questions, quand elle fait ça, j’ai l’impression d’être un enfant. Le lendemain, j’imaginai différents scénarios ou je n’étais pas responsable, après tout Fabrice aurait peut-être dérapé, avec ou sans cachet, le célibat, ça peut rendre fou, et puis dans ces histoires de viol on ne sait jamais, il y a toujours un doute sur le récit de la victime, et je ne l’ai pas inventé le sourire qu’elle avait en écoutant Fabrice, elle va se ressaisir la petite dame, c’est peut-être une chance ce qui lui est arrivé. Les flics, ils sont lents, mais ils vont bien se rendre compte que Fabrice ce n’est pas un violeur, ça va prendre peut-être un peu de temps. Lundi matin je suis partie faire un footing avant le petit déjeuner, à mon retour Julie m’a informé que je devais retourner au commissariat, rien d’important, mais le jeune officier avait fait des erreurs dans sa retranscription, il fallait que je resigne un autre exemplaire de ma déposition. Je me suis douché, j’ai déjeuné et j’y suis allé. Le jeune inspecteur m’a souri, il m’a demandé de m’asseoir, il s’excuse, il est dyslexique, il avait oublié des petits mots pendant sa saisie, quelques : de, à ; alors il préférait que je signe un exemplaire correct de ma déposition. Mais avant, il avait une ou deux questions. Il prend un carnet qu’il ouvre et il me dit :
 — Je note tout, je n’ai pas une très bonne mémoire, enfin c’est ce que dit ma femme, alors je note. Quand j’ai eu votre femme, Julie au téléphone ce matin, elle est aussi bavarde que la mienne, il sourit, elle m’a dit qu’elle était au courant pour votre déposition, on a discuté un peu, elle m’a dit qu’elle avait aperçu votre ami Fabrice une fois ou deux, et qu’elle était très surprise qu’on le soupçonne de viol, pour elle, c’est un homosexuel refoulé.
 — Moi aussi, enfin je veux dire moi aussi je suis surpris.
 — Elle a continué en me disant qu’elle voyait mal, Fabrice acheter de l’ecstasy pour droguer une collègue. Après avoir eu votre femme, j’ai eu un doute.
— Sur quoi ?
 — Le dimanche est passé par là, j’étais invité au mariage d’un cousin à Calenzana, alors hier soir j’étais un peu fatigué, par prudence j’ai préféré faire la route tôt ce matin. Mais je ne me souvenais pas qu’on ait parlé samedi d’ecstasy, j’ai relu votre déposition, et je n’en ai pas trouvé de trace.
— Je ne sais pas pourquoi elle a dit ça.
— Moi non plus, mais on en parle beaucoup en ce moment aux informations et aussi dans les séries télé, mais quand même, j’ai appelé mes collègues à La Rochelle, et effectivement il s’agit bien d’ecstasy avec du GHB, un cocktail magique. Ils ne le savaient pas samedi, ils n’avaient pas encore reçu les résultats, en ce moment il ne faut pas être pressé.
— Elle a dû entendre ça à la télé
— C’est ce que je me suis dit, mais dans le doute j’ai appelé votre femme, il y a cinq minutes, et elle est presque sûre que c’est vous qui lui avez parlé d’ecstasy, mais la mémoire.
Il attendait une réponse de ma part, je n’ai rien dit. Il a repris:

  • Mes collègues de La Rochelle m’ont appris ce matin que plusieurs témoins vous avaient vu servir les derniers verres bus par la victime et Fabrice et hier soir un témoin qu’ils n’arrivaient pas à joindre a fait sa déposition au commissariat de Calais, ce jeune homme était allé fumer une cigarette sur le parking du collège et il vous a vu aller derrière la voiture de Fabrice et disparaître une ou deux minutes, il a cru que vous refaisiez vos lacets après avoir pris quelque chose dans la voiture de Fabrice, le côté de la voiture où deux pneus ont été dégonflés. Les deux pneus que mes collègues sont en train d’examiner, peut-être qu’ils y trouveront des empreintes. Déjà, avant de faire votre déposition, je vais vous préciser les risques pour votre ami Fabrice, il risque entre dix et quinze ans de prison, et violeur en prison, ce n’est pas le meilleur profil. À l’âge qu’il a, comment il en ressortira ?
    Il me regarde puis après un long silence il me pose cette question :
  • Est-ce que votre ami Fabrice mérite de finir sa vie en prison ?
    Et il ajoute d’une voix calme, presque amicale :
  • Alors que pouvez-vous me dire sur ce cachet d’ecstasy ?
    J’ai hésité, je ne voulais pas parler, je voulais gagner du temps, je flottais dans une mare d’incertitude, je ne sais pas pourquoi j’ai dit ces mots:
     — C’est un petit cœur rouge.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *